La population de Cordulies splendides la plus septentrionale du Sud-Est de la France est menacée sur le Bassin de l’Eyrieux

Planche de la description originale de Cordulia splendens, son « premier » nom datant de 1841

La Cordulie splendide (Macromia splendens) est une Libellule localisée dont la répartition est limitée à la France et la Péninsule ibérique. Ses populations considérées comme menacées, seraient selon les dernières indications en déclin plus encore sur leurs meilleures localités du Languedoc ou de l’Occitanie, probablement sous l’effet des changements climatiques (Cédric Alonso, com. or.). L’espèce est actuellement considérée comme Vulnérable au niveau global et en France. Elle a le même statut sur la Liste Rouge rhônalpine de 2014. Le contexte est malheureusement en faveur d’une situation plus critique.

Exuvie de Macromia splendens (Eyrieux) – © Sébastien Darnaud

Consulté par courrier le 5 octobre 2024, par Sébastien Darnaud, il est question de menaces sur les populations de Macromia splendens de l’Eyrieux. En effet des modifications de la qualité du substrat associées à de purges de boues anoxiques, voire toxiques pourraient avoir des conséquences graves sur la Biodiversité de la rivière puisqu’elles sont libérées en amont au niveau du Cheylard ! Si du point de vue odonatologique, plusieurs espèces de grand intérêt sont connus sur le Bassin comme Gomphus graslinii, Thecagaster bidentata, Onychogomphus uncatus par exemple, l’espèce emblématique de l’Eyrieux est sans conteste la Cordulie splendide dont il s’agit de la population la plus septentrionale dans le Sud-Est de la France. Une vision résumée, mais aussi complète que possible s’avère nécessaire en préambule. Elle est fondée sur la qualité de la base O’donata (Groupe Sympetrum & Faune AuRA 2024) qui trouve ici toute son utilité pour réaliser des synthèses propres à fonder des actions de connaissance et de préservation des environnements aquatiques, complété par des connaissances personnelles de la littérature et des données. Ce préambule étant réalisé, les collaborations et les modalités de la nécessité d’action pourront se dessiner. Elles seront recherchées notamment avec les structures adéquates susceptible d’agir sur la conservation de cet espace classé Natura 2000. Notons que le BEED, la FRAPNA Ardèche et le Groupe Sympetrum s’étaient déjà associés pour animer une journée du Grand Marathon des Libellules le 26 juin 2022 dont l’animation est assurée par La Selysienne. A suivre…

Achille Guénée (1809-1880), co-fondateur et Président de la SEF

La citation de Macromia splendens dans les collines au-dessus du Bassin de l’Eyrieux est connue de très longue date et il s’agit d’une des toutes premières localités découvertes de l’espèce en France avec celles de l’Hérault et du Poitou. Dans les années 1860 (la date exacte étant connue1), Achille Guenée, co-fondateur en 1832 de la Société Entomologique de France, et à l’époque président de cette association, fait la première observation de l’espèce pour l’Ardèche et Rhône-Alpes. Cet entomologue est bien connu pour ses travaux sur les Lépidoptères. Il faut attendre près d’un siècle et demi pour retrouver l’espèce sur le secteur. Ainsi c’est en 2013 pour que Guillaume Aubin (Naturalia Environnement) découvre un fragment d’exuvie, néanmoins déterminable, sur la rivière de la Glueyre à Saint-Sauveur-de-Montagut (PDF)2. Selon la base O’donata (Groupe Sympetrum & Faune AuRA 2024), la mention suivante est rapportée par Cyrille Deliry le 21 juin 2014 de nouveau sur Saint-Sauveur-de-Montagut, sur la Glueyre3. Le lendemain, rapportée à Sébastien Darnaud, la Cordulie est découverte sur le cours même de l’Eyrieux aux Ollières-sur-Eyrieux avec 8 spécimens4. Le même jour cinq autres localités sont indiquées essentiellement sur l’Eyrieux par Cyrille Deliry, toujours dans le cadre des OdoRunAlpes de 2014, mais l’une d’elles concerne l’Auzène (Pranles)5. Les recherches se poursuivant le 23 juin 2024, Sébastien Darnaud rapporte une mention très en amont sur Saint-Sauveur-de-Montaigut sur la Glueyre, et il s’agit d’un imago térritorial (sexe non précisé : supposé mâle). Eric Gaillard découvre sur la Glueyre encore, 4 exuvies sur le même arbre le 29 juin 2014, ce qui témoigne d’une densité très significative de l’espèce sur la rivière en certains points en amont du village de Saint-Sauveur-de-Montagut. Bien que des sessions spécifiques d’OdoRunAlpes ait eu lieu chacune des années suivantes, elles ne sont pas toutes reportées comme telles dans la base O’donata et en définitive il y en a fort peu. Les mentions sont « autres » : une donnée en 2015, une en 2016, puis des citations régulières dès 2017… mais aucune de celles récoltées lors des OdoRunAlpes n’apparaît clairement dans la base. En 2017, Macromia splendens est découverte très en aval du cours de l’Eyrieux sur Saint-Vincent-de-Durfort et Dunières-sur-Eyrieux par Julie Coutout, Clément Chauvet et confirmée p.p. par Sébastien Darnaud, Régis Krieg-Jacquier (OdoRunAlpes) ou Gauthier-Alaric Dumont. La même année, l’espèce est trouvée plus en amont encore sur la Glueyre. Le 24 juin 2018 l’extension des connaissances est étendue encore plus en aval, avec la commune de Saint-Fortunat-sur-Eyrieux, où au moins 2 spécimens sont signalées (un mâle territorial et une exuvie) par Sébastien Darnaud, Paul de Ferrière et Gauthier-Alaric Dumont6. Très en amont sur la Glueyre, la Cordulie est signalé, imagos compris, les 18 juillet, 28 août, ainsi que très tardivement le 13 septembre7 2018 par Sébastien Darnaud au niveau de la commune d’Albon-d’Ardèche. La Dunière abrite aussi la Cordulie splendide comme le montre l’observation faite le 23 juin 2019 d’un spécimen par Sébastien Darnaud (Saint-Michel-de-Chabrillanoux). Le 26 juin 2019, Pierre Juliand et Éric Gaillard, avec la découverte d’une exuvie (non sexée) repousse la limite aval connue pour la population de Cordulie, plus bas sur la commune de Saint-Fortunat-sur-Eyrieux. Le maximum aval est quasi atteint lorsque le 2 juillet 2019, Sébastien Darnaud cite un spécimen (imago ou exuvie ?) sur Beauchastel à près de 1500 m de l’embouchure avec le Rhône. Un hiatus d’une dizaine de kilomètre où aucune citation n’a jamais été faite entre Saint-Fortunat et Beauchastel est à alors à résoudre ! Ainsi les recherches faites en 2019 à Saint-Laurent-du-Pape sont-elles veines alors que les habitats sont présents. En 2020 de nouvelles citations confirment la présence de l’espèce de nouveau très en amont sur la Glueyre à Albon-d’Ardèche. De ce côté là un hiatus existe aussi et par exemple l’espèce n’est pas trouvée malgré des recherches adéquates en 2020 à Saint-Pierreville. Les prospections ont été étiques en 2023 (un seul individu précisé en août à Saint-Sauveur-de-Montagut). Il en est de même en 2024 où selon Faune France, la seule mention de l’année concerne une exuvie, sur une des meilleures localités connue sur la Glueyre à Saint-Sauveur-de-Montagut (Sébastien Darnaud le 21 juin 2024). Sébastien Darnaud (in litt., 6 octobre 2024) révèle l’existence d’une importante population sur l’Eyrieux en amont de la confluence avec la Glueyre. Celle-ci n’est pas renseignée dans la base régionale O’donata : à suivre…

L’analyse de données disponibles pour Macromia splendens permet de dresser les grandes lignes de la progression de connaissances depuis 2013 (base O’donata mise à jour en 2023 et Faune France pour 2024). La découverte sur le secteur (un peu plus au sud dans les collmines) faite dans les années 1860 par Achille Guenée, est suivie d’un siècle et demi pendant laquelle la présence de l’espèce n’a pas été signalée. Une analyse fine des prospections faites sur le Bassin de l’Eyrieux reste à faire pour savoir s’il s’agit d’une réinstallation ou d’une lacune de connaissance. Toutefois dès 2013 et 2014, les indications sont en faveur d’une population bien établie. Jusqu’en 2019 les recherches permettent de mesurer l’aire occupée par l’espèce qui va de la Glueyre en amont depuis Albon-d’Ardèche à proximité de l’embouchure sur Beauchastel. Néanmoins de secteurs sans observations, malgré de recherches spécifiques subsistent tant côté amont sur la Glueyre entre Saint-Sauveur-de-Montagut et Albon sur près de 20 km et côté aval entre Saint-Fortunat-d’Eyrieux et Beauchastel avec aucune mention sur près de 10 km. En réalité les stations connues ne sont denses que sur une grosse dizaine de kilomètres. Les indications sur les affluents autres que la Glueyre sont probablement le cas de populations fonctionnelles, sur l’Auzène et la Dunière… mais elles sont peu recherchées par les naturalistes et apparaissent relativement secondaires. Sébastien Darnaud (BEED) se distingue par son travail de suivi très régulier et les recherches sur cette espèce depuis une dizaine d’années. De nouvelles recherches sont prévues en 2025. À noter que l’Eyrieux en amont de son embouchure avec la Glueyre ne présente pas de populations, mais aucune indication ne précise des prospections adéquates aux résultats négatifs On devra améliorer la qualité des saisies, car il manque de nombreux détails ou précisions.

Situation septentrionale du Bassin de l’Eyrieux pour Macromia splendens basé sur une carte extraite des Odonates en France (Deliry 2022)
Synthèse cartographique résumée de la population de Macromia splendens sur l’Eyrieux selon les connaissances disponibles en octobre 2024 – ©© byncsa – Cyrille Deliry (Histoires Naturelles)
Stations de Cordulies splendides les plus en amont sur la Glueyre et sur l’Eyrieux, soit entre 8 et 12 km de la confluence située à Saint-Sauveur-de-Montagut – Fond emprunté au site Géoportail IGN France – En image, son exuvie spectaculaire, vue de dessus
Histoires NaturellesBassin de l’Eyrieux
Environnement Développement

Actions, à faire et préconisations… (état au 7 octobre 2024)

Le degré d’urgence et d’importance des options est estimé par des ••• !

  • Découverte et description de Macromia splendens (localité-type en France) depuis l’Hérault et découverte en Poitou et en Ardèche (références à préciser). Amélioration du contexte d’observation de l’espèce par A.Guénée en Ardèche dans les années 1860. •
  • Consultation des Atlas locaux : Rhône-Alpes et Ardèche afin de mettre en perspective les connaissances de Macromia. ••
  • Article de la découverte de l’espèce sur l’Eyrieux rédigé par Guillaume Aubin probablement à citer et développer. ••
  • Établissement de la liste des OdoRunAlpes et des participants réels, ainsi que mise au net des données odonatologiques associées en particulier au sujet de Macromia splendens et de la mention de Gomphus graslinii : mise en forme de métadonnées à mettre en parallèle des données saisies réellement et établissement du niveau de validité des observations correspondantes. ••
  • Point sur la situation d’Oxygastra curtisii une autre espèce patrimoniale importante sur le Bassin de l’Eyrieux. •••
  • Point sur les actions menées pour la connaissance et la préservation passée des Odonates et leurs habitats sur la Vallée de l’Eyrieux, en particulier par le GRPLS et l’association BEED, ainsi que les Bureaux d’études concernés. Caractérisation du site Natura 2000. Bibliographie. •••
  • Concertation et mise en forme des collaborations avec les structures agissantes en termes de préservation. •••
  • Établissement des faits associés à la libération de boues anoxiques voire toxiques en 2024, actions, réactions, perspectives de la séquence Éviter – Réduire – Compenser. À quelles étapes nous trouvons-nous ? ••••
  • Possibilité de synthèses voire dossier rouge : un article de synthèse sur Macromia splendens était prévu dès 2014 et il n’a toujours pas été rédigé, un Dossier Rouge est l’outil adéquate pour fonder des préconisations, actions, réactions. •••
  • Extension des prospections entre les rivières de l’Eyrieux et de l’Ardèche8 ainsi qu’à proximité plus au nord9. Les recherches plus en amont sur l’Eyrieux pourraient aussi être pertinentes10.

  • 26 juin 2022 – Animation locale du Grand Marathon des Libellules (animation générale de La Selysienne ➚) sur le Bassin de l’Eyrieux par l’association BEED (présentation ➚).
  • 5 octobre 2024 – Consultation par courrier électronique de Cyrille Deliry par Sébastien Darnaud (BEED) sur la problématique de libération de boues anoxiques voire toxiques sur le cours de l’Eyrieux.
  • 6 octobre 2024 – Dans le cadre des activités des Histoires Naturelles (Odonates du Monde), je réalise sur mon compte GRPLS, l’extraction des données opensource, sur le Bassin de l’Eyrieux à partir de la base O’donata (Groupe Sympetrum & Faune AuRA 2024) pour les années 2023 et antérieures et de Faune France pour l’année 2024. Mise en forme et analyse des données de Macromia splendens ainsi qu’assemblage des éléments historiques accompagnée d’un résumé cartographique. Appel à collaboration auprès du GRPLS et de la FRAPNA Ardèche. Contact avec le BEED (Sébastien Darnaud).

Détails de l’actualité sur FaceBook

Références citées

  • Deliry C. 2022 – Odonates en France. – Histoires Naturelles n°65, v.3 du 17 février 2022 (première édition le 12 février 2022). – PDF
  • Groupe Sympetrum & Faune AuRA [2024] O’donata, base de données odonatologique en Rhône-Alpes et Dauphiné.11 – GRPLS, LPO AuRA, Entre-Amis & col., consultée le 6 octobre 2024 selon un polygone centré (fig. Eyrieux) sur le Bassin de l’Eyrieux. – ONLINE12

Références à compléter…

Webographie

Fig. Eyrieux – Polygone d’emprise centré sur le Bassin de l’Eyrieux consulté sur la base O’donata le 6 octobre 2024 : lot de 3394 données

  1. L’observation d’Achille Guenée des années 1860 est connue avec précision y compris en termes de localisation (voir article correspondant) : à améliorer. ↩︎
  2. La date exacte de la découverte par Guillaume Aubin (Naturalia Environnement) est de plus étayée par des photographies. Elle est relatée par un article : à améliorer. ↩︎
  3. Les détails de cette observation rapportée à Cyrille Deliry, sont connus et interviennent dans un OdoRunAlpes ayant mobilisé de nombreux observateurs : à améliorer. ↩︎
  4. Cette découverte s’est faite dans le cadre de la deuxième journée des OdoRunAlpes en 2014. Les détails de cette observation sont mieux connus et de mémoire, puisque j’y était, il s’agissait d’exuvies : à améliorer. ↩︎
  5. L’ensemble de ces données sont connues avec précision et concernent toutes des exuvies : à améliorer. ↩︎
  6. Plusieurs citations qui paraissent à fusionner sous forme d’une métadonnée synthétique apparaissent dans la base O’donata cette année là et le jeu des dédoublonnages semble avoir conduit à une disparition d’une partie des informations. ↩︎
  7. La donnée est imprécise et ne signale que la citation d’un spécimen. Par défaut il devrait s’agir d’un imago, toutefois une exuvie « reservée » et decouverte à une date tardive peut être envisagée. ↩︎
  8. •• Ouvèze, La Payre, Laveyzon [?], Escoutay. ↩︎
  9. •• Turzon [?], Embroye [?], Largentière [?], Les Aurets [?], Doux, • La Tuilière [?], Ozon [?], L’Ay, La Cance, La Limony [?], Le Batalon [?], La Valencize [?]. ↩︎
  10. ••• Barrage des Collanges, •• L’Eyrieux amont, La Dorne. ↩︎
  11. Notes pour l’amélioration des observations : Préciser et référencer l’observation d’Achille Guenée : années 1860, alors qu’elle est connue avec précision y compris en termes de localisation (voir article correspondant). La date exacte de la première mention de Guillaume Aubin (Naturalia Environnement) en 2013 est connue avec précision. • Revoir l’orthographe : Achille Guénée. ↩︎
  12. Observateurs principaux : Aubin Guillaume*, Barral Aurélie, Bazin Nicolas, Bauvet Corinne, BEED, Bouniol Julien*, Buffet Victoria, Buissart Julien, Caffin Marie-Pierre, Carlet Charlotte, Chapuis Sylvain*, Chauvet Clément, Cousin Philippe, Coutout Julie*, Cuypers Maartens, Darnaud Sébastien*, David Loéc, Dayde Stéphanie, De Ferrière Paul*, De Knegt Bart, De Titta Alexandre, Delhome Benoét*, Deliry Cyrille*, Dumont Gauthier-Alaric*, Falatico Pierre, Faton Jean-Michel, FNE Ain, Flammant Philippe*, Fressinaud Mas de Feix Erwan, Gaillard Éric*, Grèzes Jean-Philippe, Gross Katell, GRPLS, Guénée Achille*, Guerbaa Karim, Issartel Gérard, Jego Valentin*, Juliand Christine, Juliand Pierre*, Kolanek Nathan, Krieg-Jacquier Régis*, Ladet Alain, Lootsma Hiele, LPO AuRA, Meynet Dominique, Mounier-Rigaud Chantal, Naturalia Environnement, Nijland Peter, Noally Loup, Noirjean David, OdoRunAlpes*, Oms Hugo, Overweg Julian, Palomares Vincent, Parrain Lisa, Parrain Nicolas, Pavlik Marin, Pissavin Stéphane, PNR des Monts d’Ardèche, Prat-Mairet Yves, Ribatto Édouard, Ruiter M., Sanitas Claude*, Schaming Quentin*, Schleicher Jörg,, Soudane Roger, Tcheng Emmanuel, Thivolle Antoine, Ton Louis, Tourel Jean-Sébastien, Troost Louis, Vehaar René, Viallet Melchior. – Bases sources : Bazin, Bouniol*, Deliry*, Faton, Juliand*, Faune Ardèche*, Faune AuRA*, Faune France*, GRPLS*, Ladet, Observado, Pissavin, Sfo INVOD – Les ressources concernant Macromia splendens sont mises en évidence par le signe « * » : 122 mentions. ↩︎