'Thalassalestes'

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'Thalassalestes' Deliry, [2004]


• [ad] Lestes (en préparation)
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Systématique

Bechly [1998] souligne que Lestes macrostigma est avec Chalcolestes viridis, un représentant tout à fait primitif de l'évolution des Lestidae. Nous avons suggéré en conséquence de forger un genre particulier qui reste à décrire ([2004], Deliry 2018) ; 'Thalassalestes'.ligne

'Thalassalestes' macrostigma (Eversman, 1836)


Lestes macrostigma (Eversman, 1836) [wol]


Agrion macrostigma Eversman, 1836 - LT : Chlakov, Russie selon Steinmann (1997), nec Orembourg !
• Macrostigma : du grec, μακρός : long, large, στίγμα : marque, point : pour le grand ptérostigma.

Eversmann E.F. 1836 - Libellulinae, Wolgam fluvium inter et montes Uralenses observatae. - Libellululinarum species novae quas inter Wolgam fluvium et montes Uralenses obsevavit. - Bull. de la Soc. imp. des Naturalistes de Moscou, 8. - [online]

Lestes macrostigma (Eversman, 1836) [Rambur 1842, de Selys Longchamps & Hagen 1850, Jacobson & Bianchi 1905, Steinmann 1997, hic [2004], WOL]
• Lestes macrostigmus (Eversman, 1836) [Deliry 2017]
• Lestes picteti de Selys Longchamps, 1840 (nec Boyer de Fonscolombe, 1838) [syn. : de Selys Longchamps & Hagen 1850] (mineur)
• Lestes picteti Gené in de Selys Longchamps, 1840 (nec Boyer de Fonscolombe, 1838) [syn. : Steinmann 1997] (mineur)
• Lestes virentis de Charpentier, 1840 [syn. : Dupont 2010] (n'existe pas, Agrion virentis est chez de Charpentier (1840 : 142) comme désinence pour Chalcolestes viridis [2020])

Leste à grands stigmas [Dommanget 1987], Leste des salins [2008], Leste des sansouires [2023] [AP]
(en) Dark Spreadwing

LC 2014 UICN (déclin) - NT 2009 Bassin méditerranéen - VU 2010 Europe - EN 2010 Union européenne

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©© byncsa – Cyrille Deliry - Histoires Naturelles - France, Camargue

Répartition

Décrite de Russie, notamment de la région d'Orembourg (Eversman 1836), elle s'y trouve dans les secteurs méridionaux (Boudot & Kalkman 2015). Indiquée au Portugal sous le nom de picteti (de Selys Longchamps 1840), c'est sous le nom de macrostigma que de Selys Longchamps & Hagen (1850) la présente pour la Sicile et la Sardaigne. Elle est en Espagne, Hongrie et à Chypre, ainsi qu'en Asie Mineure (de Selys Longchamps 1862). McLachlan (1866) la cite de la Corse (France), puis Martin (1894) la signale de la région lyonnaise, où elle est de toute évidence en déplacement exceptionnel. Elle est en Ukraine (Rodzyandko 1895). Elle aurait été accidentellement été observée dans le Tessin (Suisse) au XIXe siècle (Dufour 1982). Sa présence en Algérie est incertaine selon Martin (1910), néanmoins, sans autres précisions Aguesse (1968) la donne pour ce pays. Ceci est insuffisant selon Samraoui & Menaï (1999) pour l'inscrite sur le liste des Odonates de l'Algérie. Il faut attendre le milieu du XIXe siècle pour obtenir de nouvelles précisions sur ce Leste. Elle est précisée en Arménie (Akramovski 1948), Italie (Nielsen 1954), Camargue en France (Aguesse 1955), Kazakhstan (Belyshev 1961), Roumanie (Plattner 1967). Alors que les explorations en France se poursuivent, la liste des localités s'allonge : indiquée dans l'Hérault (Cassagne-Méjean 1965), Dommanget (1987) classe l'espèce à un niveau critique de la Liste Rouge (LR 2/10). Il ne connaît l'espèce que du Midi, en particulier de Camargue, ainsi que par une ancienne mention en Poitou-Charentes. La population Atlantique est découverte peu à peu et pourrait avoir vécu une phase d'expansion : Charente-Maritime (Lebioda 1987), Vendée (Machet 1990), Loire-Atlantique avec une station très septentrionale au Marais de Guérande (Picard & Meurgey 2005a, 2005b) qui semble avoir été éphémère. Quelques compléments sont apportés entre temps dans les Balkans et le sud-est de l'Europe : indiquée en Bulgarie (Scheffler 1973), pays où elle est très menacée (CR : Popov 2015 in Lambret & al. 2023), Bosnie-Herzégovine (Andjus 1992), Slovénie (Bedjanic 1995), au Monténégro (Adamović 1996) ou Croatie (Belančić & al. 2008). Les confins de sa répartition en Asie sont précisés avec la Mongolie et la Chine (Boudot & Kalkman 2015) ou l'Iran (Schneider & Ikemeyer 2020). Les pays suivants sont signalés par le GBIF [2023] : Albanie, Autriche, Azerbaidjan, Georgie, Grèce, Israël, Kirghizistan, Moldavie, Ouzbékistan, Tadjikistran et Turkménistan. Ceci concerne de manière significative l'Asie centrale. Lambret & al. (2023) cartographient de plus la Tchéquie que je n'ai pas citée jusque là). Les références initiales des derniers pays restent à préciser. [AP]
L'espèce est considérée comme un élément méditerranéen (St Quentin 1965), holo-méditerranéen (Devai 1976), méditerranéo-touranien (hic [2020]). Elle serait présente depuis [l'Afrique du Nord] et l'Europe méridonale au sud-ouest de l'Asie (Dommanget 1987), reléguée au Paléarctique Ouest (Steinmann 1997), sa présence en Asie centrale et au-delà est ajoutée par Boudot & Kalkman (2015), l'espèce atteignant la Mongolie et même la Chine. Le tout est précisé : depuis l'Europe occidentale littorale à l'Europe centrale, le Moyen Orient et l'Asie (Deliry 2017). Elle descend jusque sur le littoral de l'Italie et des îles méditerranéennes (Boudot & Kalkman 2015). Elle ne dépasse pas le 49e parallèle en Asie centrale (Boudot & Kalkman 2015), ce qui est un peu au nord du marais de Guérande (France) situé au niveau du 47e parallèle (hic [2023]). Cette libellule est localement commune dans la partie centrale de son aire en Europe mais elle devient de plus en plus rare dans les parties occidentales (hic [2020]).
Voir 'Thalassalestes' macrostigma en France
En résumé elle est présente depuis la Péninsule Ibérique à la Turquie, l'Israël et l'Iran, des populations continentales étant connues dans le centre de l'Europe et jusqu'en Asie centrale (Mongolie, Chine). On a noté des individus erratiques jusqu'en Allemagne par exemple. Ceux-ci sont tout à fait exceptionnels et concerne un événement de dimension séculaire (hic [2023]).

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©© bync - Luca Boscain - Roumanie le 14 juin 2014 - femelle - iNaturalist

Habitats

'Thalassalestes' macrostigma est régulièrement associée à des habitats temporaires, saumâtres et salins et, très souvent, au Scirpe maritime (Bolboschoenus maritimus) sur le littoral de l'Atlantique en France, de la Méditerranée, des mers Noire et Caspienne. On la trouve aussi sur des habitats steppiques (salés) depuis l'Autriche, la Hongrie à l'Asie centrale et sur le sous-ouest de la Sibérie, voire jusqu'en Mongolie (hic [2020]). Dans le Caucase, elle occupe aussi des eaux douces peut s'observer en grand nombre (C.Goyaud, com. [2023]) ce qui est en accord avec la présentation faite par Kosterin (2015).
Voir la présentation détaillée des habitats.

Phénologie et populations

Eversman (1836) précise que l'espèce vole en juin-juillet en Russie méridionale. Dommanget (1987) annonce les dates optimistes pour les plus tardives, allant de mi mai à septembre. La dernière période me paraît tout à fait exceptionnelle, voire erronée (C.Deliry, com. [2022]). La date la plus tardive donnée sur OpenObs en France est celle du 27 août 2001 en Vendée (Faton 2021). De fait les premiers contacts ont lieu début mai en Corse (Berquier 2016) et Chelmick & Lambret (2020) disent les observations se poursuivent au moins jusqu'à la fin du mois de juillet, avec un optimum des émergences seulement début juin sur la façade Atlantique. Les période de maturation dure une quinzaine de jours (Lambret 2010) et les imagos vivent jusqu'à 50 jours (Chelmick & Lambret 2020). J'ai pensé lors de mes premières analyses que les imagos volaient de la mi mai à la fin août, ce, en fonction de la latitude ou suivant les années selon les conditions météorologiques, le tout accompagné par un pic des observations en juin (hic [2020]).
Comme chez les autres Lestes d'Europe, les œufs passent l'hiver sans éclore (hic [2020]). Le développement larvaire survient au printemps et il est très rapide puisqu'il ne dure selon Aguesse (1960) que de 8 à 10 semaines ou 50 à 70 jours selon Schiel & Buchwald (2015 in Lambret & al. 2023). Ceci correspond à une durée inférieure à deux mois et demi. Les œufs éclosent selon Lambret & al. (2017 in Lambret & al. 2023) entre la mi-mars et le début du mois d'avril.
Il s'agit d'une "espèce à éclipse" qui fluctue naturellement, phénomène sensible, et, aggravé par les facteurs de menaces généraux (MNHN & al. 2017). Les stations semblent bien fonctionner sur un principe de métapopulations et leur occupation ou production peut clairement fluctuer d’une année à l’autre (hic [2020]).
La salinité ou la végétation ne semblent pas avoir d'impact majeur sur la densité des populations larvaires, par contre l'inondation tardive des sites en automne ou en hiver, paraît favoriser les plus fortes densités. Il en est de même pour la plus faible surface des sites. La dimension des adultes est supérieure lorsque les eaux sont plus profondes (probablement parce que plus froides). Les variations connues des populations chez cette espèce doivent être corrélées avec les facteurs précédents. En conséquence les mises en eau trop précoces des sites est défavorable au développement de l'espèce (Lambret & al. 2023).

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©© byncsa – Jean-Michel Faton
Couple en tandem pondant sur des Scirpes maritimes dans la réserve de la Tour du Valat en Camargue en 2009 (Bouches-du-Rhône - France)

Notes de biologie

Cette espèce est parasité au niveau des ailes par les Arabis (Forcipomyia paludis), 60 autres espèces d'Odonates sont connues pour être parasités par ce petit insecte de l'ordre des Diptères (Martens 2012).
Après des émergences massives, l'espèce peut se disperser et se retrouver loin de leur site de reproduction le plus proche (Kuhn 1998, Marinov 2007) ; on estime par exemple à 300 km le cas d'un mâle et d'une femelle observés en Espagne en juin 2018 (Frutos Cuadrado & al. 2019). Ces valeurs sont similaires à celles des observations faites très exceptionnellement vers Lyon (300 km) ou en Isère (290 km) (hic [2023]).
L'accouplement dure une quinzaine de minutes, la ponte se faisant en tandem dans les secteurs abrités du vent (Houard 2020).

Menaces

Nombre de ses habitats côtiers subissant la pression moderne par artificialisation du littoral sont menacés. L'espèce est classée EN sur la Liste Rouge au niveau de l'Union européenne (2010) et en France (UICN & al. 2016). Les stations les plus remarquables en Europe occidentale sont le Coto Doñana en Espagne, ainsi qu'en France, le Marais du Vigueirat (Crau humide) et la Tour du Valat en (Camargue) (Chelmick & Lambret 2020). La démoustication par l'entremise du Bti (Bacillus thuringiensis israelensis) conduit à la disparition collatérale des resources alimentaires de larves de ce leste, comme les Chironomes ou les Cladocères (MNHN & al. 2017). J'ajoute que la gestion hydraulique des salins vient altérer (ou a contrario favoriser), ainsi que la mise en "culture" des anciens bassins jusqu'alors délaissés sont des sources majeures de menaces pour le Leste à grands stigmas (hic [2023]).

Références spécifiques

Antonini T. 2019 - Effet de la salinité sur les traits d’histoire de vie des larves et adultes de deux espèces d’Odonates : Lestes macrostigma et Lestes sponsa. - Master 2 “Biodiversité, Écologie et Évolution”, UMS Pythéas, Université d’Aix Marseille.
Bedjanic M. 1995 - Lestes macrostigma, a new species for the dragonfly fauna of Slovenia and rediscovered in Croatia. - Exuviae, 2 (1) : 10-12.
Chelmick D. & Lambret P. 2020 - Lestes macrostigma (Eversmann), the Dark Spreadwing (2020). - J. of the British Dragonfly Society, 36 (2) : 84-108. - [pdf^]
Frutos Cuadrado I.M., Bernal Sánchez A. & Martínez Fernández J.C. 2019 - Primera cita para la provincia de Badajoz de Lestes macrostigma (Eversmann,1836) (Odonata: Lestidae) y confirmación de su presencia actual en Extremadura (suroeste de la península ibérica). - Boletín de la Sociedad Entomologica Aragonesa, 29 : 215-219.
Kuhn, J. 1998 - Ein neuer Fund von Lestes macrostigma (Eversmann) in Bayern (Zygoptera: Lestidae). - Libellula, 17 : 97-101.
Lambret P. 2010 - Dynamique d’une population d’adultes de Lestes macrostigma (Eversmann, 1836) et implications pour son suivi : l’exemple de la Camargue (Odonata, Zygoptera : Lestidae). - Martinia, 26 (1-2) : 19-28.
Lambret P. 2016 - Contribution à la connaissance du micro-habitat larvaire de Lestes macrostigma (Odonata : Lestidae). - Martinia, 32 (1). - [online]
Lambret P., Hilaire S. & Stoks R. 2017 - Egg hatching phenology and success of Lestes macrostigma in two temporary brackish ponds. - Intern. J. of Odonatol., 20 (1) : 1-12.
Lambret P., Jeanmoujin M. & Stocks R. 2023 - Factors driving larval abundance and adult size of the threatened Lestes macrostigma (Odonata) : keys for water management and habitat restoration. - J. of Insect Conservation, 20 février 2023.
Lebioda B. 1987 - Un méditerranéen exilé en Charente-Maritime : Lestes macrostigma (Eversmann, 1836)(Odonata Anisoptera : Lestidae). - Martinia, 6 : 27-28.
Machet P. 1990 - Présence de Lestes macrostigma (Eversmann, 1836) dans l'île de Noirmoutier, Vendée (Odonata, Zygoptera, Lestidae). - Martinia, 6 (1) : 17-18.
Martens A. 2012 - Lestes macrostigma (Eversmann, 1836) (Odonata, Zygoptera : Lestidae) en tant qu’hôte de Forcipomyia paludis (Macfie, 1936) (Diptera : Ceratopogonidae). - Martinia, 28 (2).
McLachlan R. 1866 - Occurence of Lestes macrostigma Eversmann, in the island of Corsica. - Entomologist’s mon Mag., 3 : 141.
Picard L. & Meurgey F. 2005a - Découverte d’une population de Lestes macrostigma dans le département de la Loire-Atlantique (Odonata, Zygoptera, Lestidae). - Martinia, 21 (3).
Picard L. & Meurgey F. 2005b - Lestes macrostigma (Eversmann, 1836) dans les marais saumâtres de Loire-Atlantique (Odonata, Zygoptera, Lestidae). - Martinia, 21 (4) : 139-150.
Plattner H. 1967 - Zum Vorkommen von Lestes macrostigma Eversmann, 1836 [sic !] in Rumänien. - Dt. Ent. Z., 14 (3) : 349-356.
Robin J.G. 2013 - Evaluation de la répartition du Leste à grands stigmas Lestes macrostigma (Insecta, Odonata) sur une zone d'anciens marais salants (La Barre-de-Monts, Vendée). - Le Naturaliste vendéen, 11 : 45-50. - [pdf^]